Facteurs Agravants

Nous ne sommes pas tous égaux face à la dépendance. Alors qu’il est normal d’être dépendant sur beaucoup de points (boire, manger, dormir…), certains d’entre nous développent plus que d’autres un besoin de consommer tel produit (drogues ou d’autres produits comme le sucre par exemple) ou d’avoir tel comportement (achats compulsifs, jeux d’argent, cyberdépendance…).

La Régularité et la Fréquence

Cela signifie que plus un produit (ou un comportement) est associé largement à des actions/des contextes de vie différents, plus cela deviendra une habitude qui s’inscrira de manière profonde et dont la personne ne pourra plus se passer.

Par exemple, je goûte à ma première cigarette à 14 ans : je n’apprécie pas le goût de ce produit mais comme tous mes amis fument, je fume de temps en temps avec eux à la sortie des cours (environ une cigarette par semaine).
Cas 1 : Petit à petit j’y prends goût et j’associe le tabac à d’autres contextes : après le déjeuner, à la sortie des cours, sur le chemin du retour, en attendant une amie, etc. A 20 ans, je fume 15 cigarettes par jour : ça me fait un sacré budget mais je n’imagine pas mon café sans ma cigarette.
Cas 2 : Je continue à fumer de temps en temps avec mes amis mais à 20 ans je ne me suis finalement jamais acheté de paquet de cigarettes. Ainsi, dans cet exemple et en rapport à ce facteur de régularité, on comprend bien que le cas 1 est plus susceptible de développer une dépendance au tabac que le cas 2.

La Précocité

Cela signifie que plus on commence précocement à consommer un produit/à avoir un comportement qui apporte des effets positifs recherchés, plus cela deviendra un moyen primordial pour atteindre cet objectif. En effet, avant 16/17 ans, le cerveau n’est pas arrivé à maturation (il le sera complètement à 22-25 ans) et les habitudes de vie ne sont pas encore pleinement construites.

Par exemple, j’ai dix ans et j’ai toujours beaucoup de difficultés à trouver le sommeil. Mon entourage est épuisé par ce problème.
Cas 1 : Un jour, on me donne une pilule miracle qui me fait tomber de sommeil très rapidement (un somnifère). Je suis soulagé car depuis que je prends ce médicament, je n’ai plus de problème pour m’endormir. La seule chose qui me dérange c’est que, aujourd’hui à 15 ans, je ne peux plus me coucher sans. Cas 2 : Un jour, on m’emmène chez un sophrologue qui m’apprend à me détendre en maîtrisant ma respiration. Cela a mis un peu de temps pour que je parvienne à me détendre seul mais aujourd’hui, à 15 ans, je ne souffre plus de troubles du sommeil.

Ainsi, dans le cas 1, l’enfant apprend que pour s’endormir, il a besoin d’une réponse extérieure (un produit qui agit immédiatement) et dans le cas 2, il apprend à gérer ses émotions de manière autonome. Dans les deux cas, comme l’enfant est jeune, ces réponses (médicament vs respiration) resteront fortement associées aux troubles du sommeil durant toute sa vie mais elles n’auront pas les mêmes conséquences sur son état de santé physique et psychique.

L’Insécurité Physique et Psychique Ressentie ou Vécue

On entend ici par insécurité, l’ensemble des fragilités, physiques et psychiques qu’une personne ressent ou a ressenti et qui a des conséquences sur sa manière de percevoir son environnement, sur son comportement et sur sa gestion émotionnelle. Cela peut aller d’un simple événement déstabilisant jusqu’à un drame personnel particulièrement douloureux (maladie, perte d’emploi, enfance difficile, séparation, difficultés financière, deuil, prise d’otage…). Plus une personne se sent fragile, moins elle va avoir de ressources pour se sentir mieux et plus il va être facile pour elle de « s’accrocher » à un produit ou à un comportement qui va lui apporter rapidement l’effet désiré.

Par exemple, à 30 ans, je viens d’apprendre le décès d’une personne à qui je tenais particulièrement. Je suis dévasté. Je me confie à un ami qui me propose d’aller boire un verre pour décompresser…
Cas 1 : Depuis ma naissance, ma vie est plutôt difficile. Maltraité par mes parents, je suis placé dans plusieurs familles d’accueil jusqu’à mes 18 ans. Je n’ai pas vraiment d’emploi fixe, je vis seul et je n’ai pas vraiment de loisirs.
Cas 2 : Depuis ma naissance, j’ai une vie globalement équilibrée. J’ai des parents aimants, une vie professionnelle stable, une vie sociale et de couple épanouissantes et j’aime me détendre en faisant du sport.

Ainsi, à travers cet exemple (certes caricatural), on peut comprendre que le verre d’alcool qui va « soulager » n’aura pas la même importance dans les deux cas, et donc pas la même accroche. Dans le cas 1, la substance psychoactive qu’est l’alcool pourra facilement avoir le rôle de « soulageur privilégié» et cela bien au-delà de l’événement présent. En effet, cette personne a tellement peu de ressources qu’il peut lui être très compliqué d’envisager une autre source de soulagement dans d’autres de ces futures épreuves à vivre. A l’inverse, dans le cas 2, les sources de détente sont bien établies depuis de longues années, il est donc plus aisé pour cette personne de ne pas percevoir l’alcool comme le seul moyen de se sentir mieux.